lundi 22 juin 2009

Née à midi, morte à minuit

On dort pas longtemps.  On entend les pigeons le matin, ou les enfants, ça dépend.  On déjeûne.  Après déjà il faudrait qu’on dîne, mais on n’a pas le temps.  On se rejoint au théâtre, on mange des fruits, on boit du thé, on boit du café, on boit des litres d’eau.  On sue comme des perdus.  Il fait chaud, il a fait affreusement chaud tout le début de la semaine dernière  -  on a très chaud.  On court.  On se met de la peinture partout.  On court.  On se jette sur les murs, sur le planchers, on se jette les uns sur les autres.  On mange des fruits.  On boit du thé.  On pleure.  Le deuxième jour on s’est joué les trois spectacles:  on a pleuré toute la journée.  On se demande bien dans quel état les spectateurs vont se retrouver.  On se parle d’élégance dans la parole, de poésie, de sens.  On se parle aussi de micros, on se dit oui mais avec les micros, on nous répond c’est la meilleure équipe au monde pour microphoner du théâtre, on arrête de parler de micros.  On se parle d’horaire.  On essaie d’oublier l’horaire.  On se parle de musique.  On se retrouve à jouer du djembé, même.  On parle de faire vibrer le lieu, ce grand lieu ouvert sur le cosmos, sur le ciel, sur les comètes et sur les voeux secrets qu’on avait lancés dans la main ouverte de l’univers  -  un des acteurs me dit:  toute cette histoire fait que j’ai, en ce moment, l’âge que j’avais quand je rêvais de jouer là.  On se chuchote plein de secrets tout le jour, pendant que nos camarades fondent sur la scène.  On est émus souvent.  On mange tous ensemble dans le théâtre le soir.  On a des grands frissons et on tremble en silence.  On se trouve beaux.  On fait des italiennes avec  les nouveaux.  On change tout.  On change les entrées, on change les sorties, on change l’espace entre nous parce que tout à coup le plateau est infini.  On est fiers et inquiets et fragiles et concentrés.  Des fois on s’applaudit.  Comme quand on réussit une grande manoeuvre de groupe compliquée avec le décor, un changement de fou qui fait un boucan pas possible et qui donne l’impression au coeur qu’il va enfin sortir de la poitrine, et s’envoler, pour de bon  -  ah, les amis:  ça va être beau.  On s’applaudit aussi juste d’avoir passé à travers la journée, des petites fois.  On rigole.  On est déjà fatigués.  On a peur pour nos voix, on boit du thym, on prend des plantes, on mange du miel, on veut que ça tienne.  On veut que tout tienne.  On a mal partout, je vous dis pas.  On tient bon.  On prend des bains.  On dort et on espère qu’on pourra dormir assez.  On a des bleus.  Bref, on est radieux.  En fait, en fait:  on répète.  

  


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