samedi 21 novembre 2009

Écrire

Regarder par la fenêtre. Faire des petits dessins dans un grand cahier qu’on traîne depuis deux mois. Avec des flèches, des coeurs, des petits barbos, des dates qui ne marchent pas toutes. Voir la lumière changer. Trouver la lumière parfaite. Éplucher une clémentine. L’oublier. Aller se laver le visage, aller se laver les mains. Sentir la rose. Faire un thé vert japonais et compter les minutes d’infusion alors qu’on ne fait jamais ça. Monter le chauffage. Mettre un foulard. Mettre de la musique, écouter du Bach, écouter Bon Iver, écouter Cat Power, fermer la musique. Appeler ma soeur. Trouver avec elle mon père et mon frère, parler une demi-heure, changer de sujet, parler de Noël, de vaccin, des chances de gagner du Canadien et de quoi faire pour souper. Raccrocher, avoir le goût d’aller patiner. Écouter de la musique de Noël. Descendre les poubelles. Marcher dehors pour la première fois de la journée. Aller acheter de la soupe aux tomates, du jambon, du pain. Revenir. Se verser un verre de vin rouge.

S’asseoir devant l’ordinateur, rester les yeux dans le document ouvert, ouvrir un autre document. Relire un bout de l’histoire de Mike, notée sur une feuille volante. Transcrire une phrase. Ouvrir une fenêtre. Penser à Mike qui racontait sur la terrasse avec tant d’humilité et de douceur, derrière ses fonds de bouteille trop grands. Penser que personne, jamais, ne demande à Mike de raconter. Trouver ça triste.

Faire des toasts. Faire chauffer la soupe. Changer l’eau des fleurs qui ont perdu toutes leurs feuilles en une nuit. Manger le sandwich et aller refaire du thé.

Prendre ses courriels. Espérer que quelqu’un nous ait écrit quelque chose de beau, quelque chose de formidable, de fou, espérer une bonne raison de hurler de joie ou de tout laisser tomber pour sauter dans le premier avion, on aurait le temps, on ne joue pas avant samedi. Espérer un mot de toi. Espérer être bouleversée.

Trois nouveaux messages. Des billets pour un spectacle et un autre mot gentil. Ce n’est pas tout à fait ça mais c’est quand même mieux que des prospectus. C’est mieux que tout à fait rien. Se demander tu es où. Se demander si toi tu sais. Qui je suis. Et que tu t’en viens.

Avoir soif. Avoir mal aux épaules. Réchauffer le thé. Penser à Juliette qui lu dans ma tasse et qui n’a pas vu d’amoureux. Espérer qu’elle se trompe, la petite vlimeuse, avec ses 94 ans que tu te dis c’est sûr qu’elle lit pour vrai dans les feuilles, c’est sûr que ça marche son affaire. Câline. Donner le nom de Maurice à un personnage plutôt qu’à un enfant. Répéter les noms: Rosa et Maurice. Ça marche. Se dire qu’on n’ira pas à Berlin, finalement, c’est trop loin. Se dire il faudrait qu’on apprenne l’allemand, c’est ridicule. Être un peu découragée. Être un peu toute seule à Stuttgart. Être un peu habituée.

Regarder par la fenêtre.

Recommencer demain.

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